Quelles sont les obligations légales de l’employeur pour prévenir les risques de chute de plain-pied ?

La loi impose à l’employeur un devoir de prévention et de protection vis-à-vis de ses équipes. Cela implique une analyse rigoureuse des risques de chute de plain-pied et la mise en œuvre de solutions adaptées.
Ce que dit la réglementation
La réglementation française encadre strictement la prévention des risques liés aux déplacements dans les espaces professionnels. À travers quelques articles du Code du travail, l’accent est mis sur l’obligation pour l’employeur de garantir un environnement de travail sécurisé, accessible et bien entretenu. Cette responsabilité couvre aussi bien les locaux intérieurs que les accès extérieurs et les postes exposés aux travaux en hauteur.
Article R.4224-3 : Faciliter une circulation sans danger
Cet article impose à l’employeur d’organiser les espaces de manière à permettre une circulation fluide et sans risque. Cela implique
- La mise en place de cheminements bien délimités et dégagés
- L’absence d’obstacles permanents ou temporaires dans les zones de passage
- La prise en compte des spécificités des personnes à mobilité réduite
L’objectif est d’éviter toute situation propice à la chute, même dans des configurations complexes ou à forte fréquentation.
Article R.4224-18 : Maintenir la propreté et la sécurité des sols
Au-delà de l’aménagement initial, le maintien des conditions de sécurité dans le temps est une obligation essentielle. L’article R.4224-18 stipule que les locaux doivent faire l’objet d’un entretien régulier, notamment pour éviter que des salissures, des déversements ou des encombrements ne rendent les sols glissants ou impraticables.
Cela concerne par exemple
- Le nettoyage immédiat après des opérations salissantes (nettoyage industriel, manipulation de liquides)
- Le retrait des emballages, des outils ou des objets laissés au sol
- La surveillance des zones sensibles comme les entrées exposées aux intempéries
Articles R.4323-58 à R.4323-80 : Un encadrement spécifique pour les travaux en hauteur
Même si les chutes de plain-pied sont au cœur de la prévention quotidienne, les chutes de hauteur font l’objet d’une réglementation technique spécifique, notamment lorsqu’il s’agit d’interventions sur des échafaudages, toitures ou plateformes.
Ces articles imposent
- L’installation de protections collectives (garde-corps, filets de sécurité) en priorité
- Le recours aux équipements de protection individuelle (EPI) uniquement en l’absence d’alternatives collectives
- Des vérifications régulières du matériel de sécurité et des conditions de stabilité
Ils rappellent aussi que la formation des travailleurs exposés à ces risques est obligatoire, afin d’éviter toute improvisation ou négligence.
La responsabilité directe de l’employeur
La sécurité des déplacements professionnels repose sur une obligation de moyens renforcés pour l’employeur. Il lui incombe non seulement de détecter les risques existants, mais également d’y répondre avec des mesures concrètes, durables et adaptées aux réalités du terrain.
Évaluer les dangers en amont : le rôle du DUERP
Le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP) constitue le socle de toute politique de prévention. Il doit être actualisé régulièrement pour
- Répertorier les zones sensibles (couloirs glissants, plateformes en hauteur, escaliers étroits)
- Intégrer les retours d’expérience en cas d’incident ou de presque-accident
- Adapter les mesures de prévention en fonction des évolutions des locaux ou des activités
Élaborer un plan de prévention adapté
Une fois les risques identifiés, un plan d’action structuré doit être mis en œuvre. Celui-ci inclut
- L’élaboration de procédures claires de circulation et d’intervention
- L’organisation de sessions de sensibilisation et de rappels réguliers
- La vérification de l’adéquation entre l’environnement de travail et les dispositifs de sécurité en place
Ce plan ne peut être statique : il doit être suivi, corrigé et mis à jour pour rester pertinent.
Mettre à disposition des équipements adaptés aux contextes
Les protections fournies doivent être ciblées selon les zones et les tâches. Pour les zones glissantes : chaussures de sécurité avec semelles antidérapantes normées et pour les chutes de hauteur : harnais, longes avec absorbeur d’énergie, points d’ancrage fixes.
En cas de manquement : quelles conséquences pour l’employeur ?
Un défaut de prévention ou une négligence dans l’application des mesures de sécurité peut entraîner des conséquences graves.
Inspections, mises en demeure et arrêts d’activité
L’Inspection du travail peut intervenir à tout moment. En cas de constat d’infractions
- Des mises en demeure peuvent être adressées à l’employeur, assorties de délais de mise en conformité
- Un chantier peut être suspendu ou une activité stoppée si des risques graves sont identifiés
- Des amendes administratives sont également prévues selon la gravité des manquements
Engagement de la responsabilité civile et pénale
En cas d’accident causé par une carence en prévention :
- L’entreprise peut être poursuivie au civil pour indemniser la victime ou ses ayants droit,
- Si une faute caractérisée est reconnue, la responsabilité pénaledu dirigeant peut être engagée, notamment pour mise en danger délibérée d’autrui.
Les conséquences vont donc bien au-delà du dommage corporel : elles touchent la réputation, la pérennité et la légitimité même de l’entreprise.
Comment les autres pays gèrent-ils la prévention des chutes de plain-pied ?
Si les contextes diffèrent, certains pays se distinguent par des politiques particulièrement efficaces qui offrent des pistes à suivre pour améliorer la sécurité en entreprise.
États-Unis : la rigueur de l’OSHA et des campagnes nationales ciblées
L’Occupational Safety and Health Administration (OSHA), équivalent américain de notre inspection du travail, impose des normes particulièrement strictes concernant la sécurité au travail, notamment sur :
- Les caractéristiques des revêtements de sol
- Résistance au glissement, entretien obligatoire, signalisation immédiate des zones glissantes
- L’usage d’équipements adaptés
- Les tapis de sécurité, les barrières temporaires ou les chaussures normées sont couramment exigés dans les secteurs industriels et logistiques
Par ailleurs, l’OSHA mène régulièrement des campagnes nationales de prévention, ciblant les secteurs les plus exposés (BTP, restauration, entrepôts), avec des outils de communication très visuels et des formations interactives.
Pays nordiques : prévention participative et normes exigeantes
Danemark, Suède, Norvège ou Finlande ont un point commun : une implication forte des salariés dans les démarches de prévention. Cette approche collaborative repose sur différents piliers
- Des comités de sécurité internes actifs où employeurs et employés analysent ensemble les risques et proposent des améliorations concrètes
- Un haut niveau d’exigence en matière d’ergonomie et d’aménagement : revêtements au sol adaptés, éclairage optimal, signalétique claire font partie des standards
La prévention y est vue comme un levier de bien-être au travail et non comme une contrainte réglementaire.
Allemagne : rigueur des inspections et système d’incitation financière
En Allemagne, la prévention passe par un dispositif d’inspections fréquentes menées par les caisses d’assurance accidents (BG – Berufsgenossenschaften). Ces dernières jouent un double rôle : contrôle et accompagnement.
Certifications de sécurité
Certaines entreprises obtiennent un label qui prouve leur engagement en matière de prévention, ce qui renforce leur image et leur attractivité.
Système de bonus/malus sur les cotisations d’assurance
Une entreprise qui applique rigoureusement les normes peut voir ses charges diminuer. À l’inverse, les manquements répétés entraînent des surcoûts.
Ce système économique pousse les employeurs à intégrer la sécurité dans leur stratégie globale de performance.
Les chutes de plain-pied
Sources
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